Témoignage de Sophie Keller,
Innover en prenant soin de l'humain et de la nature
- Qui es-tu en deux mots…
Je suis Sophie. J’ai 41 ans, je suis mariée à Vincent, nous avons 2 enfants qu'on aime de tout notre cœur, de 3 et 5 ans, Héloïse et Théodore.
Arrivée à Strasbourg en 2016 pour y rejoindre Cécile, ma coéquipière avec qui je vis un engagement fort au sein du Labo des Partenariats, je sens depuis un attachement grandissant pour cette "ville des Possibles" comme me le rappelle souvent une amie très chère.
Ville à l’histoire forte et marquante, ville magnifique, accueillante, verte, ouverte sur l’Europe, fraternelle. Une ville où la vie spirituelle est nourrie, fleurit même, grâce, sans doute, à une place essentielle, plus assumée, des religions dans nos vies personnelles et dans la vie publique
2. Quelle est ta fonction actuellement ? Pourquoi as-tu accepté cette fonction, qu’est-ce que cela représente pour toi ?
Jusqu’à récemment, j’ai été co-directrice d’une association que nous avons impulsée ici à Strasbourg à partir de 2016, le Labo des Partenariats, et dont la mission principale est de révéler le pouvoir d’agir de chacun·e pour construire et développer ensemble des solutions qui transforment notre territoire en un espace prenant soin de l’humain et de la nature.
Ses activités sont les suivantes :
- Accompagner et accélérer des solutions grâce à un incubateur d’innovation sociale,
- Animer un tiers lieu, la Tour Merveilleuse du Schloessel, au cœur du Parc Naturel Urbain de Strasbourg,
- Mobiliser les énergies citoyennes et animer une communauté d’acteurs engagés pour une vie meilleure
L’équipe est composée de 7 salariés et de nombreux bénévoles au grand cœur ! L’action menée depuis 2016 montre l’élan magnifique d’engagement des citoyen·es au service des solutions qui transforment nos vies. En effet, ce sont plus de 8 500 personnes qui ont participé à des temps forts pour réouvrir les possibles et 860 personnes qui ont sauté le pas de l’engagement dans 48 solutions concrètes. Ces projets dans le lien social, la solidarité, l’agriculture urbaine, les circuits courts alimentaires, l’économie circulaire, le soin à nos ainés, la convivialité, la solidarité, la mobilité douce… ont touché directement la vie de 8% des habitant·es de notre métropole.
Vous trouverez ici un aperçu des solutions citoyennes qui se sont développées dans la dynamique Start-Up de Territoire1, que l’on porte.
Pourquoi est-ce que j’ai décidé de mettre mon énergie à développer ce projet associatif ?
Parce que c’est un lieu inédit dans lequel nous avons la chance de pouvoir ensemble inventer le monde dont on rêve pour demain, en vivant au quotidien dans nos cœurs et dans les liens entre chacun.e, d'un esprit d’audace, d’enthousiasme, de confiance, d’entraide, qui change tout ! Oui c’est cet esprit qui rend tout possible, et l’étude d’impact que l’on a pu mener en 2002-2023 confirme effectivement que la diffusion d’un esprit et de méthodes d’animation pour recréer des espaces où le rêve est réhabilité, où les solutions sont premières, où l’action devient possible, est un levier majeur du changement que l’on souhaite tous !
Je me sens privilégiée de faire partie d’une aventure qui nourrit mon espérance au quotidien, et qui est porteur non seulement de résultats qui changent nos vies dans notre territoire à travers les projets qui naissent mais qui nous amène chacun.e aussi à cheminer et à vivre des transformations plus intimes. Nous avons notamment au la chance de nous former à la gouvernance partagée et la communication non violente et nous essayons chaque jour de les expérimenter dans nos liens.
3. Qu’y as-tu vécu d’important, d’événements marquants ?
Une aventure humaine si belle !
Je suis touchée par l’aspiration profonde de toutes les personnes que je rencontre grâce à ce projet, à agir pour prendre nos responsabilités et trouver un rôle dans la construction des solutions dont on a besoin. Et pourtant … seul.e, c’est compliqué, voire impossible !
Quand nous repensons à tous les temps forts citoyens que nous avons pu animer, rassemblant jusqu’à 1500 personnes pour quelques heures, on sent combien l’envie est grande, les talents immenses, et les possibles à révéler grandioses !
Chaque équipe d'habitant.e qui démarre et se lance dans un projet, qu’on accompagne pendant 1 voire 2 ans, est merveilleuse d’énergie, d’enthousiasme, de vision pour un mieux-être collectif.
Cette énergie citoyenne est porteuse de tant d’espoir, comment pouvons-nous en prendre soin, la révéler toujours plus ? Créer ces espaces essentiels où on reprend confiance en soi, en l’autre et dans l’avenir ensemble ?
C’est cela qui me touche le plus, sentir ce commencement, cette flamme qui se rallume, ce désir dans les cœurs qui est là et qui peut tout changer.
4. Comment et pourquoi t’es-tu engagée sur la voie de la non-violence ? Dis-nous en deux mots ce que cela représente pour toi ?
Je ne sais pas si je suis engagée sur le chemin de la non-violence, mais effectivement on essaie de transformer à notre mesure ce qui peut être parfois du découragement, des doutes, de la colère face à l’état actuel du monde en actions positives et transformatives pour notre territoire. Passer de nos indignations ou de nos rêves à l’action… ensemble !
Au-delà nous sommes convaincus que c’est en apprenant à faire mieux ensemble qu’on arrivera toujours plus à révéler les talents dans les cœurs de chacun.e et à vraiment changer les choses. C’est pourquoi nous nous formons à la CNV (communication non violente), à la gouvernance partagée et des nouvelles méthodes d'animation, sans cesse, qui créent de la bienveillance et révèlent la créativité individuelle et collective.
5. As-tu d‘autres expériences à évoquer ?
J’ai la chance de m’engager cette année dans l’équipe qui déploie la formation spirituelle « Le Cœur qui Discerne » ici à Strasbourg. Une formation de 9 mois pour permettre à chacun.e de renouer avec son cœur profond et affiner son écoute intérieure pour répondre aux appels à plus de vie qui sont les nôtres, grâce au trésor de la spiritualité de St Ignace.
Ce parcours est le miroir de mon engagement ci-dessus, il permet in finie d’entrer dans un chemin libérateur vers notre vocation, par l’écoute quotidienne. Oui, nous avons tant besoin de nous reconnecter à la source même de notre vie, par le silence, dans notre quotidien, afin d’oser la vie, chaque jour.
Cette quête individuelle profonde représente les racines mêmes de l’aspiration collective à laquelle nous essayons de répondre à travers notre aventure entrepreneuriale et citoyenne.
6. En guise de conclusion, le thème de notre congrès est tiré de l'évangile des Béatitudes, “Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu”. A titre personnel que t'inspire cette proclamation ?
Dans l’accompagnement spirituel individuel, que j’ai la chance de vivre dans le cadre du Cœur qui Discerne, je contemple avec étonnement et émerveillement combien l’aspiration à la paix du cœur est toujours première. C’est sans doute ce que je peux ressentir de plus fort quand les personnes intègrent le parcours.
Alors oui, contribuer chacun.e à sa mesure à cette paix dans nos cœurs et bien au-delà, dans le cœur des autres, est sans doute contribuer à l'œuvre de Dieu, au plus profond de nous.
J’ai toujours, non loin de là, cette parole qui m’habite et raisonne tant, d’Etty Hillesum (Une vie Bouleversée). “Notre unique obligation morale, c'est de défricher en nous-même de vastes clairières de paix et de les étendre de proche en proche, jusqu'à ce que cette paix irradie vers les autres. Et plus il y aura de paix dans les êtres, plus il y en aura aussi dans ce monde en ébullition.”
1 : Start-up de territoire, https://startupdeterritoire.fr/
Recueilli par Anne BRESSON