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Marc Fleuret

Directeur d’usine



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1.     Peux-tu te présenter en deux mots, ton parcours, ta fonction, tes convictions ?

Je suis marié depuis 25 ans et nous avons eu la joie d'accueillir 3 enfants dont les deux premiers adoptés au Vietnam et la petite dernière, le cadeau de la vie.

Professionnellement, je travaille dans des usines de production depuis 30 ans, dont de la direction d'usine depuis plus de 20 ans, dans des domaines variés comme des équipementiers automobile, de l'industrie lourde, de la fabrication en flux continu (24/7) de film thermoplastique et de textile non tissé. Ces différentes expériences nous ont emmené dans la Région de Nantes, de Brive la Gaillarde, en Inde (à 500 km au nord de Bombay) et enfin en Alsace depuis 8 ans. 

Ces 30 ans d'expériences professionnelles variées m'ont permis de dégager des invariants en termes de management d'équipes. 

Ils sont les suivants : la considération de chaque personne, le travail collaboratif, et l'apprentissage et l'amélioration continus.

 Depuis quelques mois j'ai la responsabilité de 2 usines de production de textile non tissé (pour la production de voile pour des applications telles que l'hygiène, les lingettes, la filtration de sang, les masques chirurgicaux, l'agriculture) dans lesquelles travaillent environ 170 personnes 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Sur chacun de ces sites je travaille en collaborations avec les différents syndicats (CFDT, CFE-CGC, CGT,..)

3.     Quels sont tes convictions, tes choix, tes difficultés quand tu as une décision importante à prendre ?

Lors de décisions importantes cad qui touchent directement les personnes (réorganisation par exemple), ma conviction est de toujours garder à l'esprit la ou les personnes que je vais rencontrer. La prière et la relecture sont des outils importants de préparation avant des entretiens, des rencontres, des négociations, afin de remettre devant Dieu les personnes rencontrées, les points d'attention, de vigilance et aussi d'actions à prendre, et de demander à avoir une attitude d'écoute et d'interpellation "fraternelle" et enfin de présenter avec clarté ma décision, et en assumer toutes les conséquences. Et ensuite de prendre le temps de relecture sur la façon dont les entretiens, les réunions se sont effectivement réalisées.

4.     En cas de conflit, entre syndicats, salariés..., comment réagis-tu ?

Je tente de toujours rester calme et nuancé, par une écoute respectueuse de chaque personne, et en essayant de déconnecter les propos et les postures des personnes, afin d'éviter toute attaque personnelle.

Lorsque cela n'est pas possible et que la tension monte trop, alors avec l'expérience, j'apprends à arrêter les débats et faire prendre un temps de respiration à chacun, y compris moi-même, et revenir 15 à 20 minutes après, généralement dans un climat beaucoup plus apaisé. Et dans les cas extrêmes, la grève par exemple, je ne négocie pas tant que le travail n'a pas repris, afin de redonner à chaque fois la chance et la force à la négociation.

5.    Pour toi, est-ce que la paix est une notion qui se vit dans ton entreprise ?

Oui, je pense être appelé à être artisan de paix au sein de mon entreprise. Le monde professionnel peut être très difficile dépendant des secteurs, des groupes industriels, des personnes côtoyées, et y mettre de la paix et de l'humanité est pour moi primordial, et fait même partie, je pense, d'une de mes fonctions premières. 

La paix est aussi un des critères de discernement sur le long terme d'une bonne décision. Si mes décisions "mettent" en paix les protagonistes et la société, c'est qu’elles étaient bonnes ; attention c'est un critère qui ne se juge pas dans l'immédiateté de la décision, mais après son application et une certaine durée, même si la façon d'avoir pris la décision va déjà donner une première orientation critique quant à son application.

6.     En guise de conclusion, le thème de notre congrès est tiré de l'évangile des Béatitudes, “Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu”. A titre personnel que t'inspire cette proclamation ?

Cette proclamation est pour moi un appel personnel, un appel à vivre en Paix, paix avec Dieu, moi-même, et mes prochains les plus proches, aussi bien dans le domaine personnel que professionnel.

Cet appel retentit d'une manière encore plus essentielle en ces jours troublés, où les "grands de ce monde" ne semblent exercer et ne promouvoir que le rapport de force, et donc la loi du plus fort !

Être artisan de paix est pour moi l'urgence en ce monde, et pour mener ce combat de chaque jour, j'ai la conviction que je ne suis pas seul, car aimé de Dieu de manière inconditionnelle.

Et c'est cet amour qui me donne l'espérance, cette force, cette puissance de regarder au-delà de la simple réalité, au-delà des difficultés pour y trouver quelque chose qui nous dépasse... et pour moi c'est la présence de Dieu, ici et maintenant.

Recueilli par Anne BRESSON